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Pourquoi tant de planning médiocres?

La logique derrière la cédule n’est jamais – ou presque – le problème. Ce qui rend nos plannings si médiocres est la manière dont on y intègre les ressources. Rien ne peut être fait sans ressource. Les cédules qui ne prennent pas en compte l’ensemble des contraintes qui concernent les ressources sont incomplètes et très probablement erronées.

On a l’habitude de favoriser le travail vite fait. Par souci d’économie ou pour simplifier un exercice déjà souvent considéré comme lourd et inutile, on escamote la PRINCIPALE fonction du planning : déterminer les ressources critiques. On publie donc des cédules déficientes aux collaborateurs qui sont alors orientés sur des dates improbables et qui subiront bientôt les aléas des ajustements futurs. Le plan est basé sur une infinité de ressources – ce qui n’est évidemment pas le cas – et on le réajuste chaque fois qu’un ouvrier s’absente, qu’une équipe est plus petite, qu’un décideur n’est pas disponible.

L’impact d’une telle négligence ne se limite pas à un échéancier non respecté. Au Québec en 2017, on est rendu indifférent aux retards sur les projets. Les reports sont monnaie courante et on ironise sur la pauvre gestion de nos projets…et de nos fonds publics. L’impact de l’incurie en planification est plus profond qu’on ne le croit :

1- Les collaborateurs et toutes les parties prenantes perdent totalement confiance en un plan qui ne tient pas compte de la réalité. Ils savent que le temps requis pour effectuer le travail n’est pas égal au délai d’exécution. Ils font la différence entre durée et effort et s’attendent à ce que le gestionnaire soit capable de la faire aussi.

2- Aucun directeur de projet ne retardera une date de fin avant d’avoir validé la capacité des ressources à effectuer le travail dans la période prévue. À l’inverse, on sait pertinemment que le travail bien fait nécessite du temps et que tout n’est pas qu’une question de pression à mettre sur la production. Neuf femmes enceintes ne produiront pas un bébé après un mois!

3- Nul n’apprécie être appelé et renvoyé et appelé à nouveau. Quelle que soit l’industrie, les ressources internes et externes ne sont pas des girouettes et n’apprécient pas être ballottées entre pics et vallées. Dans ce cas, les ressources se réservent, perdent du temps ou pire encore, quittent en blâmant la mauvaise gestion. L’image du projet est affectée et les rumeurs s’occupent de sa réputation.

4- Un des buts principaux de planifier un projet est de conserver un historique des événements et des activités. Si le planning de base (le baseline) n’est pas fiable, comment faire une fois le projet fini pour justifier des retards et identifier les causes de dérapages. Aucune réclamation ne peut être fondée sur le seul fait que les tâches ont glissé. Il faut se référer à un plan et à des sources fiables pour justifier les déviations. La partie adverse saura – si vous ne le savez pas – ce qui a fait glisser votre planning. C’est certainement dû à un manque de ressources.

5- Un projet est un chapelet continu de contraintes et de limitations. La principale, dans un contexte de plein emploi, est la limitation en ressources disponibles. L’échéancier bâti par un planificateur compétent devrait prévoir ce fait, l’anticiper et gérer les risques ou opportunités qui s’y rattachent.

Au cours de mes 30 ans de carrière, je n’ai jamais vu un projet se réaliser exactement comme il avait été planifié. Je conviens avec vous qu’un planning n’est jamais fini, qu’il y a une multitude de facteurs qui influencent sa bonne marche. Est-ce un argument suffisant pour rejeter le planning et laisser au hasard la coordination de nos projets? En tant que contribuable, je n’accepte pas que mon argent serve à réparer, reprendre, corriger, rattraper. Je souhaite que pour 2019, avec toute la science que nous possédons, on mette enfin l’énergie à prévoir, prévenir et éviter les embûches. C’est possible, voire facile. Il suffit de s’y mettre.

Merci pour votre attention.

Maxime Fournier, ing., M. Ing
Président de Gestion Proxima

Inspiré d’un texte de Rafael Dàvila